Geysers, lagunes et lamas

Le désert d’Atacama, au Chili, est un spectacle immobile. Magnifique. Le ciel est immensément bleu. Les couleurs et les ombres changent. On y croise des fumeroles de vapeur de geysers, des flamants roses et des vigognes.

Je poursuis le récit de mon séjour à San Pedro de Atacama, au nord est du Chili. J’ai passé six jours sur place, qui ne se résument pas à mon enthousiasmante sortie astronomie et aux couchers de soleil sur la Vallée de la mort.

Direction les lagunes de l’altiplano, à 4300 m d’altitude, et le salar de Chaxa.

Lagunas Miscanti et Minique. Chile.

Dans le minibus, je suis assise à côté d’un astronome suédois, Kalle. C’est déjà son deuxième séjour de l’année sur place. Il travaille actuellement dans l’un des observatoires internationaux de la région, haut dans les montagnes. Il me raconte le ciel clair et une tempête de neige.

Le village de Toconao

Nous nous arrêtons au village de Toconao, installé dans une petite vallée arborée au milieu de l’aridité du paysage environnant.

N’imaginez toute de même pas un coin luxuriant. Ici, tout est sec. Quand ils ne finissent pas en portail de clocher, les cactus prennent leurs aises. Il est beau, d’ailleurs, ce clocher tout blanc sur le ciel bleu. Il n’y a pas grand monde dans les rues. Deux enfants sont comme alanguis sur les jeux en plastique de la place.

Au loin, les flamands roses

Un peu plus loin, c’est le salar de Atacama. Il est sans doute moins impressionnant que le blanchissime salar de Uyuni, en Bolivie, à quelques centaines de kilomètres de là. Mais, ici aussi, le port de lunettes de soleil est quasi obligatoire, tant la luminosité est forte.

Rien n’est lisse. On dirait un champ labouré, sauf qu’il est blanchâtre, saupoudré d’un peu d’ocre. Ce sont des blocs de sel. En rêvassant vers l’horizon, je me dis que ça fait une réserve infinie pour des tomates à la croque-au-sel (oui, je sais, j’ai des pensées saugrenues). Que nenni! On me dit que tout ce sel est toxique et plein de lithium ! Voilà mes tomates transformées en une quantité folle de batteries et piles. ;-)

Salar de Atacama : laguna Chaxa. Chili.

Salar de atacama : laguna Chaxa - 04

Nous sommes précisément à la laguna Chaxa, où se trouve une réserve de flamands roses.

Ils viennent se nourrir de micro-crevettes, qui elle-mêmes absorbent une algue, qui contient un pigment, qui donne aux flamands cette couleur !

Oh ! La belle chaîne alimentaire !

Sauf qu’elle se raréfie, cette algue. Puis, à notre arrivée, les flamands mettent les bouts pour se poser plus loin à l’horizon.

Silence

Tant pis. Le paysage reste sidérant. Bleu, rose, vert, pétrole… l’eau salée est irisée de couleurs. Les montagnes enneigées  s’y reflètent. La cordillère de Domeyko d’un côté, celle des Andes de l’autre. Je m’éloigne du reste du groupe. Le silence est puissant. Epais.

Salar de Atacama : laguna Chaxa. Chili.

 

Le bruit mat du déclencheur de mon appareil photo devient un son marquant. J’ai pris des tas d’images. Je crois que celles qui sont imprimées sur la rétine de mes yeux sont plus belles. Aujourd’hui encore, quand je ferme les paupières, je vois les couleurs et les reflets. J’entends le silence.

Salar de Atacama : laguna Chaxa. Chili.

Pour voir les photos en grand, un clic sur l’une d’elles, puis faites défiler avec les flèches du clavier.

 

4300 m

Désormais, le minibus file dans les montagnes et prend de la hauteur. Nous avons grignoté un léger en-cas. « Avec l’altitude, l’énergie du corps ne doit pas être consacrée à la digestion. Nous déjeunerons plus tard, explique Valesca, notre guide. Si vous vous sentez un peu fatigués ou avez un peu mal au ventre, c’est normal. Vous n’êtes pas habitués à l’altitude et au manque d’oxygène. Ne courez pas et tout ira bien. » 

Devant le paysage de steppes qui défile derrière la vitre, je commence à redouter le mal des montagnes. Aller à 4300 m d’altitude, j’ai jamais fait. Encore moins d’une traite ! Finalement, 2000 mètres plus haut, tout va merveillement bien. Voilà las lagunas Miscanti y Miñiques.

las lagunas Miscanti y Miñiques. Chile.

Le vent froid joue à la surface de ces lacs d’altitude, sauf là où ils sont encore un peu gelés. Il fait frisquet. On est tous emmitouflés, sauf mon astronome suédois qui porte la chemisette. Il est habitué au froid vif en haut de son observatoire.

C’est superbe. Les touffes d’herbe jaunes sont plus jaunes, le ciel est plus bleu, l’air est plus pur, les ombres sont plus ombres, les nuages sont encore plus nuages… Tout est plus fort. J’adore.

Des vigognes paissent tranquillement. Je souris. Et je cours d’enthousiasme pour descendre une pente. Ouh là ! Erreur. J’en avais oublié l’altitude, elle se rappelle à moi. Je ralentis et je regarde.

Je plane.

 

Et les geysers ?

Je suis allée voir les geysers del Tatio, le lendemain. Départ à 4 h ! Ça caille, dans la nuit. J’ai mis toutes les couches de vêtements emportés. Le bonnet et les gants. C’est l’un des plus grands champs de geysers au monde. On y arrive à 6h du matin. Le moment idéal pour voir les fumeroles de vapeur chaude dans le froid du petit matin.

Il y a du monde à affronter les – 5° C, à 4300 m d’altitude. Un étonnant voyageur anglais porte seulement une veste en tweed sur une chemise blanche. Et un bonnet péruvien sur la tête ! Il fait encore noir. Les silhouettes d’autres groupes se détachent dans la lumière des phares.

Geysers del Tatio, au Chili.

Ça glougloute à nos pieds. L’eau est bouillante. Des panaches de vapeur s’élèvent du sol, partout dans le sombre horizon.

Geysers del Tatio, au Chili.Dans un coin, se trouvent les restes d’une ancienne station géothermique rouillée. Un autre projet est à l’étude.

Il inquiète beaucoup de gens qui vivent du tourisme, à San Pedro de Atacama. Le site des geysers est un « incontournable » pour les visiteurs. Ils pourraient fuir si l’endroit est dénaturé.

Le soleil se lève. Les couleurs changent. Le site paraît encore plus grand. C’est assez étrange. C’est beau, mais je trouve qu’il y a trop de monde. Ces geysers ne sont pas comme les islandais que j’ai également vus. L’eau ne jaillit pas très haut. J’ai un sentiment mitigé… jusqu’à ce que la lumière du soleil levant se reflète dans l’eau.

Je suis scotchée. Le plupart des autres touristes sont en train de boire un thé chaud et de manger des oeufs cuits dans l’eau bouillonnante

Le site s’est un peu vidé. Je savoure davantage le champ de vapeur.

Geysers del Tatio, au Chili.

Le spectacle est peu commun, tout de même ! Je traverse la vapeur tiède comme si elle allait me réchauffer. Je regarde les montagnes. Je m’approche des trous dans le sol, en attendant que l’eau ne jaillisse. Ce phénomène est fascinant.

Un peu plus loin, une piscine de béton est remplie de l’eau des geysers refroidie par l’air à 30°C. On peut s’y baigner. J’ai mon maillot de bain, mais le froid me fait préférer garder mes vêtements.

Au moment du départ, à la sortie du parc, surgit ma vue préférée. Nuages et vapeur ont la même couleur, la même épaisseur. C’est là que j’aurais aimé boire mon thé. ;-)

Geysers del Tatio, au Chili.

Le village de 5 habitants

En repartant, nous nous arrêtons dans un petit village. Machuca, je crois. Seule une poignée d’habitants y vit encore, profitant des haltes des touristes de retour des geysers. L’un d’eux fait griller des brochettes de lama. Une autre vend bonnet et gants.

Le cadre est superbe, avec les montagnes à l’horizon. Les toits des maisons sont tous surmontés de petites croix.

La vallée arc-en-ciel

Je ne vais pas détailler toutes mes balades et excursions, au départ de San Pedro de Atacama. Mais je rajoute quand même quelques photos de la Valle de Arcoiris (arc-en-ciel), une zone de collines rocheuses. Là, la pierre prend des teintes vertes, roses ou violacées.

Lamas et renards

Juste à côté, c’est Hierbas buenas, une vallée où paissent lamas (des animaux domestiques) et des vigognes (des animaux sauvages). A l’époque pré-hispanique, les caravanes s’y arrêtaient en route pour faire des échanges avec les gens de l’actuel Chili.

Dans la pierre, des dessins (pétroglyphes) datent de cette époque. On y trouve des symboles chamaniques, des dessins en provenance de civilisations péruviennes et aussi tout plein d’animaux. Des renards, et des lamas notamment.

Ces derniers étaient encore dans le coin, en juillet 2013. ;-)

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