De drôles de fours et du pisco sour
Dans la vallée de l’Elqui, au Chili, soleil et vignes font pousser le raisin qui donne le pisco, la boisson nationale. Y « poussent » aussi des fours solaires, où mijotent des repas sous l’effet des rayons…
Ça chauffe de l’intérieur
C’est sucré et acidulé. La première gorgée vous donne comme un coup de fouet. On sent le liquide descendre le long de l’œsophage. Il laisse comme un petit sentier de feu à l’intérieur du corps.
C’est du pisco sour, le cocktail national au Chili. A la base, il y a du pisco, une eau de vie de raisin. On y ajoute du citron, du blanc d’œuf et du sucre.
Ça a un goût de reviens-y. Les deuxième et troisième gorgées vous réchauffent franchement ! Surtout en buvant celui de la photo. J’avais choisi le cocktail fait à partir du pisco à 42°. Un peu plus alcoolisé que le pisco le plus vendu, mais au goût plus fin aussi.
A la fin du verre, j’avais les joues rouges.
Dans les vignes
Direction l’arrière-pays de La Serena, à cinq ou six heures de route au nord de Santiago. Je poursuis le récit de mon voyage au Chili. La vallée de l’Elqui est le coeur de la production du pisco.
Passé la partie la plus luxuriante où poussent papayes et autres fruits et légumes, le paysage est plus aride. Il est sillonné de vignes, coincées entre les montagnes. Elles sont partout. Hautes ou basses. Pour le pisco ou pour le vin.
C’est l’hiver. Il fait 24°C. Là aussi, le ciel est bleu éclatant. Là aussi, comme dans le désert d’Atacama, il y a des observatoires et des astronomes. On voit aussi partout des références à la poétesse Gabriela Mistral, originaire de la région et prix Nobel de littérature en 1945. Des statues, des fresques, des noms de rues…
Mais il y a aussi des drôles de zigues qui voient des Ovni, des mystiques qui croient dans les champs magnétiques… Moi, la rationnelle, je me dis qu’il y a peut-être de l’abus de pisco dans tout ça…
D’ailleurs, ici, on voit le logo Capel, sur fond rouge, à chaque coin de rue. Au kiosque du vendeur de tickets de loto, sur l’enseigne des restos, sur des t-shirts…
Capel, c’est la marque d’une immense fabrique de pisco. Une usine qui envoie ses bouteilles d’eau de vie de raisin dans tout le pays et à travers le monde, à partir de Vicuña, dans la vallée de l’Elqui. De la grosse artillerie, quoi.
A l’aéroport, j’ai croisé ces bouteilles de pisco Capel en forme de statues de l’Île de Pâques ! Croquignolet…
Le village qui changea de nom
Je suis allée à Pisco Elqui. Le petit village s’appelait encore La Union au début du XXe siècle. Le fait qu’il ait été rebaptisé Pisco Elqui a sans doute un lien avec les Péruviens, qui réclament également la paternité du pisco.
Non sans raison : au Pérou, il y a un port qui s’appelle Pisco et ils fabriquent du pisco depuis des siècles!
Cela dit, les Chiliens en produisent des litres et en consomment autant. Marrant de voir comment on peut orienter l’histoire pour des raisons économiques, des histoires de fierté nationale ou de développement touristique…
Cuves et alambics
A Pisco Elqui, j’ai visité une petite fabrique artisanale de pisco. On nous a expliqué toutes les étapes de la distillation. J’adore regarder les cuves et les tuyaux de cuivre, voir la condensation sur les parois de verre, observer le thermomètre…
A l’issue de la visite, place à la dégustation. J’ai deux tout petits godets en main, emplis d’un liquide transparent. A ma gauche, le pisco à 35°; à ma droite, celui à 42°. Testons et comparons. :-)
Le premier a surtout goût d’alcool. Le second est plus raffiné et a davantage goût du fruit. Je crois que je préfère tout de même ce breuvage en cocktail. Mmmmh, le pisco sour…
A table !
Il faut se remettre après tout ça.
Justement, dans la vallée de l’Elqui plusieurs restos utilisent des fours solaires. Je n’en avais jamais vus.
Je me dis que c’est le genre de cuisson que je ne risque pas de refaire sur mon balcon en Bretagne, où je vis. Ici, le soleil est quasi constant.
Tous ces cubes sont bardés d’une sorte d’aluminium ou de miroirs, qui réfléchissent le soleil vers le centre. Ils sont recouverts d’une vitre. C’est fascinant, quand même. C’est chaud, effectivement. Il y a un peu de condensation sur la vitre. A l’intérieur : des fait-tout.
Evidement, il faut du temps pour cuisiner comme ça à basse température. Et pour les grillades, vous repasserez !
J’ai mangé un ragoût de chèvre. Il était bien cuit… Pour le reste, j’ai goûté de plus savoureux plats. Mais ça doit être la faute du cuisto et de ses (non) assaisonnements. Dommage, je n’ai pas pris de photo du repas. J’étais trop occupée à causer avec mes voisins de table !
Boire du cactus
En revanche, j’ai apprécié le jus de copao, le fruit d’un cactus que l’on trouve dans le coin. Il a un goût acidulé et rafraîchissant. Sa texture se rapproche de celle du kiwi, avec des petits pépins noirs.
J’étais là en hiver… alors ma boisson a été mixée à partir de copao congelée. Mais j’ai aimé quand même.
Surtout que je l’ai bue devant ce paysage, sur un barrage à l’entrée de la vallée. Et ça, ça vous donne du goût à bien des plats !
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