Au milieu des volcans de Lanzarote
L’archipel des Canaries, au large du Maroc, est volcanique. Comme plein d’endroits sur la planète, sauf qu’à Lanzarote, recouverte aux trois quarts de lave, le climat sec et un parc naturel ont laissé les paysages presque comme après les éruptions, de 1730 et 1824. Fascinant.
Je l’ai déjà écrit : l’île de Lanzarote, aux Canaries, a été une très chouette découverte. J’ai un peu raconté le nord de l’île, plutôt vert, alors je poursuis le récit avec un coup d’œil sur le Parc national de Timanfaya et le sud. Cap vers un paysage volcanique !
Certes, toute l’île est volcanique, mais la région du parc est encore dans son jus, si je puis dire. La végétation y a peu ou pas repoussé en raison de du climat sec de l’île et de la préservation du site.
« Une montagne s’est élevée des profondeurs »
Les dernières éruptions, celles de l’été 1824, sont toute récentes à l’échelle de l’âge géologique. Les précédentes, de 1730 à 1736, ne sont pas bien vieilles non plus. Elles furent parmi les plus importantes de l’histoire. Elles ont façonné le paysage de cette île espagnole. Une énorme quantité de lave a été rejetée pendant six ans.
Le père Andrés Lorenzo Curbelo, curé de Yaiza et témoin de l’événement, raconte dans son journal. Tout a commencé comme ça.
Le , entre 9 h et 10 h, la terre s’est ouverte à Timanfaya, à trois kilomètres de Yaiza… La première nuit, une énorme montagne s’est élevée des profondeurs de la terre et, de là, sortaient des flammes qui ont brûlé pendant dix-neuf jours. »
Aujourd’hui, le site du Parc national de Timanfaya, au bord de l’océan, ne recouvre qu’une petite partie de la superficie touchée par les éruptions. C’est le cœur du réacteur ! Une trentaine de cônes volcaniques y sont apparus. Le paysage est sidérant lorsque l’on est aux Montañas del fuego.
Ici, presque tout se visite accompagné d’un guide ou… dans un car. S’agirait pas que la croûte de la lave cède sous le poids des visiteurs.
Au départ, j’étais un peu déçue de devoir observer le paysage derrière les vitres du véhicule, mais ça en vaut la peine. Il emmène les touristes pour un tour de 14 km.
Avec les couleurs ocres, on se croirait sur Mars. Le véhicule frôle les parois de lave durcie, avant de déboucher sur des panoramas, puis de repartir vers des paysages plus lunaires… Il paraît d’ailleurs que des photos de l’endroit auraient été montrées aux premiers astronautes dans leur préparation de l’expédition vers la Lune.
Pour voir les photos en grand, il suffit de cliquer dessus et de les faire défiler.
Au centre des visiteurs des Montañas del fuego, on vous prouve que les entrailles de la Terre affleurent ici ! Un agent du parc jette des broussailles dans un trou de quelques mètres. En moins d’une minute, elles prennent feu. Un peu plus loin, un autre homme verse un seau d’eau dans un conduit : quelques secondes plus tard, un geyser de vapeur surgit dans les airs !
À 13 m de profondeur, des températures de 610°C ont été enregistrées et elles peuvent atteindre 120°C à la surface. D’ailleurs, le restaurant des lieux s’enorgueillit de faire cuire ses plats dans un four naturel, grâce à la chaleur géothermique. De fait, les grillades sont posées au-dessus d’un puits…
Promenade à pied dans le parc
Avant de partir à Lanzarote, j’avais lu que des promenades à pied avec un guide (et gratuites) étaient possibles à condition… de réserver à l’avance. Les visites n’ont pas lieu tous les jours et les groupes sont réduits à huit personnes. J’avais donc ma résa !
Et hasard très heureux, je logeais… chez un guide du parc pendant mon séjour ! C’est Nino, dont j’ai déjà parlé. Du coup, quand je lui ai dit que j’avais mon sésame pour une visite sur la route de Tremesana, il a tenu à mener le groupe lui-même ! Sympa.
Sur les 3 km, Nino nous fait écouter le silence, raconte la géologie, parle de l’effet du vent sur la formation des volcans, de la pierre volcanique tranchante comme du verre sur laquelle il vaut mieux ne pas tomber. Il nous emmène dans une petite cavité formée par la lave figée.
Des figuiers dans la lave
Il évoque aussi ces hommes qui ont dû s’adapter après la catastrophe, comment il récupérait l’eau dans cette île sans source, comment ils ont planté des figuiers dans les lapilli. Ces petits fragments de lave roulent sous nos chaussures.
Quelques plantes poussées là grâce à la main d’agriculteurs, avant la création du parc, sont toujours là, entourées de petits murets pour les protéger du vent. Un lézard se dore sur le sol noir. Quand on lève la tête, le champ de lave se déploie jusqu’aux volcans, sans verdure. Fascinant et hostile à la fois.
Je me sens privilégiée de me promener dans ce paysage.
Lagune verte sur sol gris souris
Le parc longe la mer. Tout comme un sentier côtier, que je n’ai pas emprunté. En revanche, je suis allée juste à côté, au petit village El Golfo, en dehors du parc. Dans une petite baie, une lagune verte émerge des ocres, des rouges et du gris de la terre, le bleu de la mer en regard.
Dans la crique d’à côté, des barques se protègent du vent sur le sable volcanique. Plus loin, adossée sur des pierres, je pique-nique d’un morceau de fromage de chèvre et de pain pendant qu’une dame se dore au soleil au son des vagues.
Et de la lave sortit le vin
Le paysage volcanique façonné par l’homme peut aussi se révéler étonnant. Comme dans la vallée de La Geria. A perte de vue, des demi-lunes de pierres émergent des lapilli. Dans le creux de ces murets s’abrite… un cep de vigne.
Cette ingénieuse méthode agricole protège la plante du vent, permet d’absorber la rosée et de la conduire jusqu’aux racines plantées dans le sol arable d’avant l’éruption. Du raisin qui mûrit là, les viticulteurs de Lanzarote font le vin de malvasía (malvoisie). Pas mauvais du tout après une journée de balade. ;-)
Les vignes, avec leurs murets, dessinent une broderie de pierres et une mosaïque géante dans le paysage.
Le volcan du Corbeau…
À ceux qui n’ont pas de billet pour une balade guidée dans la parc de Timanfaya, je conseille une petite promenade que m’avait indiquée Nino : celle qui fait le tour du volcan del Cuervo.
Pour l’ambiance, cuervo veut dire corbeau en espagnol. Faut dire qu’il a des atouts pour lui, l’animal. Pas très grand, mais bien gaulé, du gris-noir, un cratère qui a de la tenue (et dans lequel on peut pénétrer). De là, il lorgne sur les silhouettes des Montañas del fuego.
Pour y accéder, rien de plus facile. Un sentier part de la route LZ56 (sur la gauche quand on va vers le nord).
J’étais seule quand je m’y suis promenée. Le Corbeau était tout à moi ! Du silence, du soleil, quelques plantes et des pierres… Quand je suis repartie, un groupe un peu bruyant s’en approchait. Je n’en ai que davantage savouré mon moment avec el Cuervo.
C’est une partie « très minérale » de l’île que je viens de décrire. Un petit détour sur la Lune. Le reste est un peu différent. J’ai aimé l’ensemble.
Petit rab de photos :
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