Ces instantanés de voyage que je garde en moi à jamais
Ce sont des moments fugaces de plénitude lors d’un voyage. Ils ne sont pas toujours spectaculaires mais ces instants sont ancrés dans mon esprit, sur ma peau, dans mon coeur. Je les ai vécus pleinement, sans arrière-pensées. Ils étaient vagabonds. Ils ont aussi peut-être été enjolivés avec le temps. J’en oublie plein, mais en voilà quelques-uns.
Enfant, dans la péninsule de Dingle
Je me souviens de cette sensation d’immensité et de bien-être face à l’océan, dans la péninsule de Dingle, en Irlande. J’avais 12 ou 13 ans. Il y avait le souffle du vent, le lointain au bout de l’horizon, les falaises et les petits bouts de plage, le vert qui court vers la mer, la saveur du voyage sans mes parents (mais avec mes oncles et tantes).
Et en me promenant, là toute seule, quelques instants, je me sentais grande. Un moment que l’on respire à pleins poumons, un moment qui vous fait penser que vous pourriez vivre dans la petite chambre de la maison isolée avec vue sur l’océan et, pourquoi pas, écrire.
Mon arrivée à NYC pour la première fois
Je garde un souvenir magique de mon arrivée à New York la première fois que j’y suis venue. Il est des endroits que l’on découvre mais qui s’imposent à vous comme une évidence. Pourtant, il n’y a là que du banal. En sortant de l’aéroport, j’ai partagé un yellow cab avec un Italien avec qui j’avais échangé quelques mots dans l’avion. Direction Manhattan.
C’était après Noël. Il faisait déjà nuit. J’étais excitée comme une enfant. Je regardais les rues défiler par la fenêtre. Je jouissais de l’instant. Tout était nouveau mais si familier à la fois. Tout était là. Les lumières, les voitures, les buildings, les gens… L’Italien est descendu dans Midtown. J’ai poursuivi jusqu’au nord de l’Upper East Side, où j’étais attendue. J’étais bien. Grisée. Prête à me laisser porter par cette sensation. J’étais chez moi sans l’être. Je savais déjà que je reviendrai. Encore et encore.
No woman no cry à Istanbul
Avec mon amoureux de l’époque, on venait de rejoindre deux amis qui étaient partis juste avant nous à Istanbul. J’avais une vingtaine d’années. Il faisait chaud. C’était le début des vacances, en soirée, et c’était bon. Pas très loin du Bosphore, on buvait des bières sur une terrasse dans la rue, au pied de la chambre où on allait dormir. On rigolait avec des Stambouliotes. Détente. Joie du début d’un séjour à travers la Turquie, en bonne compagnie.
Et Bob Marley s’est immiscé dans l’air. No woman no cry s’est mis à sortir d’un transistor. On a chanté cet hymne qui est fredonné tout autour de la planète. Et on a ri pour une bêtise. Beaucoup. Sans retenue. Parce que mon amoureux réalisait que Bob ne disait pas « no no man no cry ». Un souvenir délicieusement futile…
Je ne peux m’empêcher de repenser à cet instant dès que j’entends ce tube qui a voyagé dans de nombreux pays : à Ubud, en sirotant un cocktail, à San Pedro de Atacama autour d’un feu dans le froid nocturne du désert, à Soweto alors que je m’amusais avec des gamins…
Cette conversation avec deux Balinais
Les bonnes surprises peuvent surgir de n’importe où. Pourtant, à Bali, dans la très touristique Kuta où je passais la nuit après un mois sur l’île avant de reprendre l’avion vers Tahiti, je ne m’y attendais vraiment pas.
Je slalomais dans la foule, devant les boîtes de nuit et les boutiques pour touristes, pour rejoindre une plage plus loin. Je ralentis et cherche mon chemin. Voilà qu’un jeune homme et une femme distribuant des flyers entament une discussion avec moi. Comme ça. Après un sourire. Comme s’ils faisaient une pause dans la frénésie. Débout, dans la rue, on a causé pendant une heure d’un millier de choses, de la vie, de la mort, de la France, de Bali. Pas de banalités. Juste de la curiosité les uns envers les autres. A la fin, je suis repartie sans même qu’ils me donnent un flyer.
Médusée devant les grosses bêtes du Kruger
J’ai succombé devant la faune sauvage d’Afrique du Sud. Si je ne devais retenir qu’un instant, ce serait celui où un panorama s’est ouvert à l’horizon dans le parc Kruger.
Un paysage tout droit sorti d’un documentaire de la BBC s’étale en cinémascope. J’ai ça devant les yeux pour de vrai. Des dizaines d’éléphants, au loin, près d’une rivière, et des gnous encore plus nombreux. Etourdissant. J’en néglige de prendre des photos pour mieux savourer des yeux, des oreilles et des narines. Ces animaux sont dans leur élément naturel. Je suis l’intrus. Je suis privilégiée. Je suis petite.
NB : il y avait aussi la rencontre à pied avec une lionne (et les rugissements dans la nuit !). ;-)
Ce repas avec une quasi-inconnue à Bali
Elle était australienne. Je ne me souviens même plus de son prénom car elle n’a jamais répondu à mon mail une fois rentrée chez elle. C’est pas grave : ça n’en rend que plus jolie la parenthèse de ce dîner que nous avons partagé.
En fait, nous nous sommes rencontrées à Amed, à Bali. Elle avait fait connaissance avec une autre Australienne que j’avais moi-même rencontrée à Ubud. Nous sommes retrouvées à faire du snorkeling au-dessus de l’épave japonaise (à Lipah). En sortant de l’eau, je lui ai proposé de partager la voiture et le chauffeur que j’avais réservés le surlendemain pour découvrir le coin. La journée a été sympa, mais tout à fait à classique entre deux inconnues qui voyagent seules. Sauf qu’elle m’a invitée le soir au resto pour me remercier. Elle avait choisi l’un des plus chics du coin. On avait envie de se faire plaisir. Le chauffeur du resto est venu nous chercher à nos hôtels respectifs.
Là, sur la terrasse surplombant la mer, on a parlé et ri, bu et mangé, savouré la brise rafraîchissante dans la nuit chaude, bercées par le bruit régulier des vagues. Nous nous sommes confiées. Nous sommes devenues des amies très proches le temps d’un repas. Comme si on se connaissait depuis toujours et qu’on faisait le point sur nos vies, avec empathie et bienveillance, tout en riant. Ce fut un moment à part. Elle a refusé qu’on partage l’addition. Elle tenait à m’offrir ce repas. Le chauffeur du restaurant nous a ramenées, légèrement enivrées, dans nos hôtels. Je n’ai plus jamais eu de nouvelles.
Et tant d’autres…
Je pourrais aussi parler de mon émerveillement devant tous les plats d’un dîner japonais dans un ryokan ; de ces marches légères et seule sur les volcans lors desquelles j’étais portée par le vent de Lanzarote ; de ma légère somnolence et du goût du sel sur la peau à l’ombre des palmiers au Lagon bleu de Rangiroa ; de cette savoureuse langouste servie face à l’Océan indien, les pieds dans l’herbe à Port Saint-Johns en Afrique du sud ; de mon attente sereine la nuit assise dans ma tente pour éviter qu’elle ne s’effondre lors d’une tempête de sable dans le Gobi…
Des moments comme ceux-là, on en vit tous. Ils sont précieux. Et il n’y a pas forcément besoin d’aller loin pour les glaner. Alors je vous en souhaite beaucoup en 2017.
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